« L’Aimable Grenot », le passé retrouvé d'une frégate royale,

Grande frégate corsaire de Granville « L’Aimable Grenot » s'était perdue en mer le 6 mai 1749, avec à son bord des toiles bretonnes destinées à être vendues à Cadix.

« …Frégate construite à Granville en 1747 pour l'armateur granvillais du Sieur Leonor Couraye Du Parc. Trois mats, deux ponts et deux gaillards, 390 tonneaux, tirant d'eau chargé : 16 pieds, tirant d'eau non chargé : 14 pieds. Armé de 40 canons à sa première course, puis de 28 canons lors de la seconde campagne, équipage en course 390 hommes… »
source : « Un corsaire sous la mer » Michel L'Hour, Élisabeth Veyrat — Anne Cahière (archives familiales).

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Les canons de « L’Aimable Grenot » à Granville en 2013.

Pascal Simon (Ouest-France) - www.granville.maville.com

« Après huit ans de fouilles par 17 mètres de fond, au large de Saint-Malo, les archéologues plongeurs ont fini par identifier l'épave dite de la «Natière I». Il s'agit de «La Dauphine», un navire armé sous Louis XIV. Le retour des canons de l'Aimable Grenot, en 2013, sera l'occasion de rappeler la place de Granville dans la guerre de course.

Les canons sortis de l'eau mardi après-midi, à Saint-Malo, sur le site de la Natière (Ouest-France du mercredi 3 novembre 2010), devraient revenir dans deux ans à Granville. D'ici là, ils auront subi un traitement par hydrolyse dans le laboratoire spécialisé Arc antique, à Nantes, qui leur redonnera un coup de neuf après plus de deux siècles sous l'eau. « Nous espérons qu'ils seront de retour pour l'exposition que nous envisageons pour 2013 à la Halle au blé », explique Michèle Chartrain, conservatrice du musée du vieux Granville.

Les canons resteront la propriété de l'État et seront sur le plan juridique simplement en dépôt à Granville. Mais a priori, pour de longues années, retrouvant ainsi le port qu'ils avaient quitté à bord de l'Aimable Grenot, il y a deux siècles, avant que cette frégate de 400 tonneaux ne sombre devant le port de Saint-Malo le 6 mai 1749. Une mauvaise manoeuvre serait à l'origine du naufrage.

Un investissement pour l'histoire…
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Les canons de « L’Aimable Grenot » sont arrivés à Granville le 19 juin 2013

Les canons resteront la propriété de l'État et seront sur le plan juridique simplement en dépôt à Granville. Mais a priori, pour de longues années, retrouvant ainsi le port qu'ils avaient quitté à bord de l'Aimable Grenot, il y a deux siècles, avant que cette frégate de 400 tonneaux ne sombre devant le port de Saint-Malo le 6 mai 1749. Une mauvaise manoeuvre serait à l'origine du naufrage.

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Fouilles archéologiques de la Natière.

Anne-Marie Romero - http://www.lefigaro.fr

C'est une victoire bien méritée que viennent de remporter Michel L'Hour et Élisabeth Veyrat, codirecteurs d'une équipe d'archéologues sous-marins chevronnés du département des Recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm).

Huit ans après la découverte fortuite, par un plongeur malouin, d'un amas d'épaves, auprès du rocher dit «la Natière», le plus important, le plus beau, le plus mystérieux des deux navires étudiés vient enfin de livrer son identité. Il s'agit d'une grande frégate royale de 30 canons, La Dauphine, perdue le 11 décembre 1704, sous le règne de Louis XIV, alors qu'elle rentrait d'une course escortée d'une de ses prises, un navire anglais.

« Le site de la Natière, explique, enthousiaste, Michel L'Hour, conservateur en chef au Drassm, est un des plus attractifs au monde. Ailleurs, les épaves sont souvent en mauvais état. Ici, c'est un véritable Pompéi sous-marin. Les sites sont tels qu'ils se trouvaient au moment du naufrage. » Il y a deux raisons à cette exceptionnelle préservation : d'abord, la rapidité du naufrage, qui n'a pas permis aux marins d'emporter quoi que ce soit. Ensuite l'emplacement des rochers meurtriers qui l'ont provoqué. Situés près de la côte, ils reçoivent les alluvions drainées par la Rance, une couche de vase de plus de deux mètres, qui a protégé les bateaux, au nombre de quatre, mais dont deux seulement ont mérité une étude approfondie.

5 000 heures de travail sous-marin

Cette conservation miraculeuse a donc permis d'extraire de la coque de La Dauphine une foule d'objets témoins de la vie à bord sous Louis XIV : des céramiques normandes et allemandes, des ports en étain, des armes, épées, sabres et pistolets. Et d'autres trouvailles, plus intimes, telles des chaussures, du 34 (taille des petits mousses) au 39, des tonneaux qui nous renseignent sur l'alimentation des marins, et surtout le matériel du chirurgien, ses instruments et ses onguents, dont on pratiquera l'analyse. Plus émouvant encore, poursuit Michel L'Hour, «dans le carré H 24, nous avons retrouvé le squelette d'un singe de moins de six mois, un magot rapporté de Gibraltar, sans doute la mascotte du bord, ce qui était fréquent à l'époque».

Très vite, en effet, les chercheurs avaient décidé de ne s'intéresser qu'aux deux épaves les mieux conservées, qu'ils ont d'emblée baptisées, faute de mieux, Natière I et Natière II. Huit campagnes de fouilles, 5 000 heures de travail sous-marin et 40 000 heures de travail à terre (consolidation, nettoyage, restauration), 9 000 journées de chantier, 200 participants d'une quinzaine de nationalités, 2 500 objets remontés : l'étude des deux frégates a coûté 1,844 M€, hors restauration, financés à 35% par la région Bretagne, 30% par le ministère de la Culture, le reste par le département d'Ille-et-Vilaine et la ville de Saint-Malo.

Dès 2001, la Natière II a pu être identifiée comme étant L'Aimable Grenot, une grande frégate corsaire de Granville. Elle s'était perdue en mer le 6 mai 1749, avec à son bord des toiles bretonnes destinées à être vendues à Cadix. À l'époque, une fois la paix revenue, les frégates corsaires armées faisaient fréquemment du commerce, les routes maritimes n'étant pas sûres. L'Aimable Grenot comptait donc 40 canons. Ses 400 hommes d'équipage étaient commandés par le capitaine Joseph Hugon, sieur du Prey, qui avait accompli assez d'exploits pour que la famille de son armateur, Léonor Couraye du Parc, fût anoblie en 1778, par Louis XVI. L'Aimable Grenot avait rapporté à la couronne 670 000 livres...

Les circonstances du naufrage

Restait à percer le mystère de la Natière I. Un long travail de routine a alors commencé (voir ci-dessous). Et le miracle s'est produit cette année : la découverte du rapport de mer d'un capitaine corsaire qui raconte la perte de La Dauphine, précisant la date et les circonstances du naufrage.

La frégate, de retour d'une campagne de course au large d'Ouessant, ramenait Le Dragon, pris aux Anglais, quand un vent du sud l'a jeté sur les rochers de la Natière. Il s'agissait d'un navire du roi confié à un particulier pour être armé en course. Son capitaine, le sieur Michel Dubocage, né au Havre, avait été promu lieutenant de frégate à 16 ans. Lavé de tout soupçon après la perte de La Dauphine, il poursuivit une brillante carrière et découvrit notamment l'îlot de Clipperton dans le Pacifique. Bienfaiteur de sa ville, il mourut en 1727, honoré de tous. Ainsi se trouve comblée une lacune dans la longue histoire de la marine. »

Anne-Marie Romero - Le Figaro

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L’Aimable Grenot,
un corsaire granvillais sous Louis XV

Musée du Vieux Granville, Halle au Blé, rue du Roc. Du 1er septembre 2013 au 5 janvier 2014.

> dossier de presse



suite : Le Conquérant

 

Découverte en 1995 par un plongeur malouin, à moins de 10 mètres de profondeur, le site de la Natière livre ses trésors.

« L’Aimable Grenot », frégate Granvillaise est l'un des 4 navires découverts sur le site.

"C'est l'un des sites archéologiques sous-marins les plus attractifs au monde"
Michel L'Hour, co-directeur des fouilles et conservateur en chef du Patrimoine.